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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 4.djvu/470

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mundi ac terrarum magnitudine, de rerum natura, de deorum immortalium vi ac potestate disputant, et juventuti tradunt. » (Cæs., de Bello Gall., lib. vi, c. XIIIXIV.)

Tout ce passage de César est excellent et d’une clarté admirable ; il ne reste plus que très-peu de chose à connoître sur les classes du clergé gaulois, Diodore et Strabon, confirmés par Ammien Marcellin, compléteront le tableau.

« Leurs poëtes, qu’ils appellent bardes, s’occupent à composer des poëmes propres à leur musique ; et ce sont eux-mêmes qui chantent, sur des instruments presque semblables à nos lyres, des louanges pour les uns et des invectives contre les autres. Ils ont aussi chez eux des philosophes et des théologiens appelés saronides, pour lesquels ils sont remplis de vénération… C’est une coutume établie parmi eux que personne ne sacrifie sans un philosophe ; car, persuadés que ces sortes d’hommes connoissent parfaitement la nature divine et qu’ils entrent pour ainsi dire en communication de ses secrets, ils pensent que c’est par leur ministère qu’ils doivent rendre leurs actions de grâces aux dieux et leur demander les biens qu’ils désirent… Il arrive souvent que lorsque deux armées sont près d’en venir aux mains, ces philosophes se jetant tout à coup au milieu des piques et des épées nues, les combattants apaisent aussitôt leur fureur comme par enchantement et mettent les armes bas. C’est ainsi que même parmi les peuples les plus barbares la sagesse l’emporte sur la colère et les Muses sur le dieu Mars. » (Diod. de Sicile, liv. v, trad. de Terrasson). « Apud universos autem fere tria hominum sunt genera quæ in singulari habentur honore : bardi, vates et druidæ : horum bardi hymnos canunt, poetæque sunt ; vates sacrificant, et naturam rerum contemplantur ; druidæ præter hanc philosophiam etiam de moribus disputant. » (Strab., lib. IV.)

J’ai rendu par eubages οὐάτεις, du grec de l’édition de Casaubon, et que le latin rend par vates. Je ne vois pas pourquoi l’on veut, sur l’autorité d’Ammien, qui traduit à peu près Strabon, que le mot vates soit passé dans le grec au temps de ce géographe. Strabon, qui suivoit peut-être un auteur latin, et qui ne pouvoit pas traduire ce mot vates, l’a tout simplement transcrit. Les Latins de même copient souvent des mots grecs qui n’étoient pas pour cela passés dans la langue latine. D’ailleurs, quelques éditions ordinaires de Strabon portent euhage et eubage. Rollin n’a point fait de difficulté de s’en tenir au mot eubage.

Ammien Marcellin, confirmant le témoignage de Strabon, dit que les bardes chantoient les héros sur la lyre, que les devins ou eubages cherchoient à connoître les secrets de la nature, et que les druides, qui vivoient en commun, à la manière des disciples de Pythagore, s’occupoient de choses sublimes, et enseignoient l’immortalité de l’âme. (Amm. Marcell., lib. xv.)


60e. — page 136.

Ô île de Sayne, etc.

On a trois autorités pour cette île : Strabon, liv. iv ; Denys le Voyageur,