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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 4.djvu/615

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J’ai annoncé plus fortement et plus clairement le triomphe de la religion.

J’avois quelquefois parlé moi-même comme poëte (qu’on me passe le mot) le langage de la mythologie : j’ai fait disparoître ces légères inadvertances ; j’ai retranché plusieurs comparaisons, abrégé quelques détails de mœurs et corrigé quelques fautes contre l’histoire et la géographie.

Enfin, j’ai ajouté des remarques à chaque livre.

Ces remarques contiennent les imitations d’Homère, de Virgile, etc. Les autorités historiques se trouveront aussi dans ces notes. On y verra enfin d’assez longs morceaux de mon Itinéraire de Paris à Jérusalem, en passant par la Grèce, etc. Ces morceaux serviront de commentaires aux descriptions de la Grèce, de la Syrie et de l’Égypte. Je n’ai passé en Orient que pour visiter les lieux où j’ai placé la scène des Martyrs : il est donc tout simple que le voyage justifie les tableaux du voyageur.

J’ai écrit ces notes avec une grande répugnance, et seulement pour obéir au conseil de mes amis. Ils m’ont représenté que beaucoup de lecteurs, étrangers au langage de l’antiquité, avoient besoin d’une espèce d’explication pour lire Les Martyrs ; que c’étoit l’unique moyen de faire tomber une foule de critiques. J’ai cédé à ces raisons ; mais j’aurois mieux aimé que l’avenir, s’il y a un avenir pour moi, se fût chargé du commentaire. J’ai développé mon plan dans ces remarques et montré la suite de mes idées et de ma composition. Je l’ai fait avec sincérité et comme j’en aurois agi pour l’ouvrage d’un autre. Ces remarques apprendront du moins quelque chose à quelques lecteurs, et elles seront un monument de ma bonne foi.

Tout ceci prouve, j’espère, ce qui est déjà prouvé, mon obéissance à la critique. Elle est telle que souvent mes amis n’osent me faire des objections, dans la crainte de me voir changer et bouleverser tout au moindre mot : je n’ai point cet orgueil qui se complaît dans une erreur. Si quelque chose me rendoit indocile à la leçon, c’est la manière dont elle est donnée. Je ne reçois point un conseil sous la forme d’un outrage ; autant je pourrois craindre la séduction de la bienveillance, de l’estime, des prévenances, des égards, autant je repousse le ton impérieux et les airs de maître.

Il faut parler à présent de certains reproches qui me sont beaucoup plus sensibles que tous les autres, parce qu’ils semblent tomber sur mes amis.

On a voulu faire entendre que des hommes distingués, dont le jugement est une autorité puissante, après s’être prononcés pour Les Martyrs,