Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 5.djvu/374

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tenté par le démon ; il y remit les péchés à la femme adultère ; il y proposa la parabole du bon Pasteur, celle des deux Enfants, celle des Vignerons et celle du Banquet nuptial. Ce fut dans ce même temple qu’il entra au milieu des palmes et des branches d’olivier, le jour de la fête des Rameaux ; enfin, il y prononça le Reddite quae sunt Caesaris Caesari, et quae sunt Dei Deo ; il y fit l’éloge du denier de la veuve.

Titus ayant pris Jérusalem la deuxième année du règne de Vespasien, il ne resta pas pierre sur pierre du temple où Jésus-Christ avait fait tant de choses glorieuses et dont il avait prédit la ruine. Lorsque Omar s’empara de Jérusalem, il paraît que l’espace du temple, à l’exception d’une très petite partie, avait été abandonné par les chrétiens Saïd-ebn-Batrik 45. , historien arabe, raconte que le calife s’adressa au patriarche Sophronius, et lui demanda quel serait le lieu le plus propre de Jérusalem pour y bâtir une mosquée. Sophronius le conduisit sur les ruines du temple de Salomon.

Omar, satisfait d’établir sa mosquée dans une enceinte si fameuse, fit déblayer les terres et découvrir une grande roche où Dieu avait du parler à Jacob La mosquée nouvelle prit le nom de cette roche, Gâmeat-el-Sakhra, et devint pour les musulmans presque aussi sacrée que les mosquées de La Mecque et de Médine. Le calife Abd-el-Maleck en augmenta les bâtiments, et renferma la roche dans l’enceinte des murailles. Son successeur, le calife El-Louid, embellit encore El-Sakhra et la couvrit d’un dôme de cuivre doré, dépouille d’une église de Balbek. Dans la suite, les croisés convertirent le temple de Mahomet en un sanctuaire de Jésus-Christ ; et lorsque Saladin reprit Jérusalem, il rendit ce temple à sa destination primitive. :

Mais quelle est l’architecture de cette mosquée, type ou modèle primitif de l’élégante architecture des Maures ? C’est ce qu’il est très difficile de dire. Les Arabes, par une suite de leurs mœurs despotiques et jalouses, ont réservé les décorations pour l’intérieur de leurs monuments, et il y a peine de mort contre tout chrétien qui, non seulement entrerait dans Gâmeat-el-Sakhra, mais qui mettrait seulement le pied dans le parvis qui l’environne. Quel dommage que l’ambassadeur Deshayes, par un vain scrupule diplomatique, ait refusé de voir cette mosquée, où les Turcs lui proposaient de l’introduire ! J’en vais décrire l’extérieur :

On voit la grande place de la Mosquée, autrefois la place du Temple, par une fenêtre de la maison de Pilate.