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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 6.djvu/117

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ORIGNAL.

L’orignal a le muffle du chameau, le bois plat du daim, les jambes du cerf. Son poil est mêlé de gris, de blanc, de rouge et de noir ; sa course est rapide.

Selon les sauvages, les orignaux ont un roi surnommé le grand orignal ; ses sujets lui rendent toutes sortes de devoirs. Ce grand orignal a les jambes si hautes, que huit pieds de neige ne l’embarrassent point du tout. Sa peau est invulnérable ; il a un bras qui lui sort de l’épaule, et dont il use de la même manière que les hommes se servent de leurs bras.

Les jongleurs prétendent que l’orignal a dans le cœur un petit os qui, réduit en poudre, apaise les douleurs de l’enfantement ; ils disent aussi que la corne du pied gauche de ce quadrupède appliquée sur le cœur des épileptiques les guérit radicalement. L’orignal, ajoutent-ils, est lui-même sujet à l’épilepsie ; lorsqu’il sent approcher l’attaque il se tire du sang de l’oreille gauche avec la corne de son pied gauche, et se trouve soulagé.

BISON.

Le bison porte basses ses cornes noires et courtes ; il a une longue barbe de crin ; un toupet pareil pend échevelé entre ses deux cornes jusque sur ses yeux. Son poitrail est large, sa croupe effilée, sa queue épaisse et courte ; ses jambes sont grosses et tournées en dehors ; une bosse d’un poil roussâtre et long s’élève sur ses épaules comme la première bosse du dromadaire. Le reste de son corps est couvert d’une laine noire, que les Indiennes filent pour en faire des sacs à blé et des couvertures. Cet animal a l’air féroce, et il est fort doux.

Il y a des variétés dans les bisons, ou, si l’on veut, dans les buffaloes, mot espagnol anglicisé. Les plus grands sont ceux que l’on rencontre entre le Missouri et le Mississipi ; ils approchent de la taille d’un moyen éléphant. Ils tiennent du lion par la crinière, du chameau par la bosse, de l’hippopotame ou du rhinocéros par la queue et la peau de l’arrière-train, du taureau par les cornes et par les jambes.

Dans cette espèce, le nombre des femelles surpasse de beaucoup celui des mâles. Le taureau fait sa cour à la génisse en galopant en rond autour d’elle. Immobile au milieu du cercle, elle mugit doucement. Les sauvages imitent dans leurs jeux propitiatoires ce manège, qu’ils appellent la danse du bison.

Le bison a des temps irréguliers de migration : on ne sait trop où