Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 6.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LES HURONS ET LES IROQUOIS.

République dans l’état de nature.

Si les Natchez offrent le type du despotisme dans l’état de nature, les Creeks, le premier trait de la monarchie limitée, les Hurons et les Iroquois présentoient dans le même état de nature la forme du gouvernement républicain. Ils avoient, comme les Creeks, outre la constitution de la nation proprement dite, une assemblée générale représentative et un pacte fédératif.

Le gouvernement des Hurons différoit un peu de celui des Iroquois. Auprès du conseil des tribus s’élevoit un chef héréditaire, dont la succession se continuoit par les femmes, ainsi que chez les Natchez. Si la ligne de ce chef venoit à manquer, c’étoit la plus noble matrone de la tribu qui choisissoit un chef nouveau. L’influence des femmes devoit être considérable chez une nation dont la politique et la nature leur donnoient tant de droits. Les historiens attribuent à cette influence une partie des bonnes et des mauvaises qualités du Huron.

Chez les nations de l’Asie, les femmes sont esclaves et n’ont aucune part au gouvernement ; mais, chargées des soins domestiques, elles sont soustraites, en général, aux plus rudes travaux de la terre.

Chez les nations d’origine germanique, les femmes étoient libres, mais elles restoient étrangères aux actes de la politique, sinon à ceux du courage et de l’honneur.

Chez les tribus du nord de l’Amérique, les femmes participoient aux affaires de l’État, mais elles étoient employées à ces pénibles ouvrages qui sont dévolus aux hommes dans l’Europe civilisée. Esclaves et bêtes de somme dans les champs et à la chasse, elles devenoient libres et reines dans les assemblées de la famille et dans les conseils de la nation. Il faut remonter aux Gaulois pour retrouver quelque chose de cette condition des femmes chez un peuple.

Les Iroquois ou les Cinq nations[1], appelés dans la langue algonquine les Agannonsioni, étoient une colonie des Hurons. Ils se séparèrent de ces derniers à une époque ignorée ; ils abandonnèrent les bords du lac Huron, et se fixèrent sur la rive méridionale du fleuve Hochelaga (le Saint-Laurent), non loin du lac Champlain. Dans la suite, ils remontèrent jusqu’au lac Ontario, et occupèrent le pays situé entre le lac Érié et les sources de la rivière d’Albany.

Les Iroquois offrent un grand exemple du changement que l’oppres-

  1. Six, selon la division des Anglois.