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Page:Chateaubriand - Œuvres complètes, éd. Garnier, 1861, tome 7.djvu/57

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On entendoit de tous côtés : Il verra comme nous le servirons ! Nous sommes à lui pour la vie. Tous les intéressants exilés revenus avec leur maître de la terre étrangère, tous les officiers de l’armée se serroient la main comme des frères, se disant : Plus de factions, plus de partis ! tous pour Louis XVIII ! Telle est en France la force du souverain légitime, cette magie attachée au nom de roi. Un homme arrive seul de l’exil, dépouillé de tout, sans suite, sans gardes, sans richesses : il n’a rien à donner, presque rien à promettre. Il descend de sa voiture, appuyé sur le bras d’une jeune femme ; il se montre à des capitaines qui ne l’ont jamais vu, à des grenadiers qui savent à peine son nom. Quel est cet homme ? C’est le fils de saint Louis ! c’est le roi ! Tout tombe à ses pieds, l’armée, les grands, le peuple, un million de soldats brûlent de mourir pour lui ; on sent qu’il peut tout nous demander, nos enfants, notre vie, notre fortune ; qu’il ne nous reste plus en propre que l’honneur, seul bien dont nous ne pouvons pas disposer, et dont un roi de France n’exigera jamais de nous le sacrifice.