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mystères d’obscurité sont bien à plaindre. Il nous semble qu’on pourroit dire quelque chose d’assez touchant sur cette femme mortelle devenue une mère immortelle d’un Dieu rédempteur, sur cette Marie à la fois vierge et mère, les deux états les plus divins de la femme, sur cette jeune fille de l’antique Jacob, qui vient au secours des misères humaines et sacrifie un fils pour sauver la race de ses pères. Cette tendre médiatrice entre nous et l’Éternel ouvre avec la douce vertu de son sexe un cœur plein de pitié à nos tristes confidences, et désarme un Dieu irrité : dogme enchanté, qui adoucit la terreur d’un Dieu en interposant la beauté entre notre néant et la majesté divine !

Les cantiques de l’Église nous peignent la bienheureuse Marie assise sur un trône de candeur, plus éclatant que la neige ; elle brille sur ce trône comme une rose mystérieuse[1], ou comme l’étoile du matin, précurseur du soleil de la grâce[2] ; les plus beaux anges la servent, les harpes et les voix célestes forment un concert autour d’elle ; on reconnoît dans cette fille des hommes le refuge des pécheurs[3], la consolation des affligés[4] ; elle ignore les saintes colères du Seigneur, elle est toute bonté, toute compassion, toute indulgence.

Marie est la divinité de l’innocence, de la foiblesse et du malheur. La foule de ses adorateurs dans nos églises se compose de pauvres matelots qu’elle a sauvés du naufrage, de vieux invalides qu’elle a arrachés à la mort, sous le fer des ennemis de la France, de jeunes femmes dont elle a calmé les douleurs. Celles-ci apportent leurs nourrissons devant son image, et le cœur du nouveau-né, qui ne comprend pas encore le Dieu du ciel, comprend déjà cette divine mère qui tient un enfant dans ses bras.


CHAPITRE VI

Les Sacrements. — Le Baptême et la Confession.



Si les mystères accablent l’esprit par leur grandeur, on éprouve une autre sorte d’étonnement, mais qui n’est peut-être pas plus profond, en contemplant les sacrements de l’Église. La connoissance de l’homme civil et moral est renfermée tout entière dans ses institutions.

Le Baptême, le premier des sacrements que la religion confère à l’homme, selon la parole de l’Apôtre, le revêt de Jésus-Christ. Ce

  1. Rosa mystica.
  2. Stella matutina.
  3. Refugium peccatorum.
  4. Consolatrix afflictorum.