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224 RÉVOLUTIONS ANCIENNES.

leurs armes , des peuples corrompus , des cours vicieuses , des finances épuisées , des gouverne- ments chancelants; pourquoi , je l'avouerai, ce n'est pas sans étonnement que je vois M. Pitt portant seul , comme Atlas, la voûte d'un monde

��1 Ce langage m'oblige à déclarer que je ne suis ni l'apologiste de la guerre, ni celui de M. Pitt. Je ne connois, ni ne connoîtrai vraisemblablement ce dernier ; je n'attends ni ne demande rien de lui. Je n'aime point les grands , non que les petits vaillent mieux , mais parce que je ne sais point honorer l'habit d'un homme , et que mon opinion surtout n'en dépendra jamais. Né avec un cœur indépendant , j'exprimerai toujours hardiment ma pensée , en dépit de la fortune et des factions. J'ai donc parlé du Chancelier de l'Echiquier avec la même franchise que je l'aurois fait d'un autre homme. Est-ce d'après les déclamations des gazettes que je dois le juger? d'après les grossièretés que les François vo- missent contre lui? Qu'on prouve , et je croirai ; mais, en atten- dant , qu'il me soit permis de penser pour moi. Parce que les Jacobins ont commis des crimes , cela ne m'empêche pas de croire qu'une république est le meilleur de tous les gouvernements , lorsque le peuple a des mœurs ; le pire de tous , lorsque le peuple est corrompu. Parce que tel démagogue insulte un homme , une nation , cela ne m'empêche pas d'estimer cet homme , cette nation , tandis que l'un et l'autre me paroissent estimables. Si j'avois eu de M. Pitt une opinion différente de celle que j'ai énoncée , je l'eusse exprimée avec le même courage; je n'aurois pas mis un moment en balance ma sûreté personnelle, et ce qui m'eût semblé la vérité. Que si ce langage paroît extraor- dinaire , je le crois fait pour honorer , et moi , et l'homme d'État dont je parle ; que s'il s'offensoit de ce passage , je me suis trompé.

■ Les éloges sont fort exagérés dans ce chapitre ; mais c'est un tribut très-naturel de reconnoissance que je

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