Page:Chateaubriand - Œuvres complètes t1.djvu/44

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

xxiv PREFACE.

nesse, lorsque demi - sauvage , sans patrie, sans famille , sans fortune , sans amis, je ne connoissois la société que par les maux dont elle m'avoit frappé.

Avant d'imprimer des extraits de Y Essai, on colporta l'ouvrage entier mystérieuse- ment, en répandant des bruits étranges. Pourquoi se donnoit-on tant de peine ? Loin d'enfouir Y Essai, je l'exposois au grand jour et je le prètois à quiconque le vouloit lire. On prétendoit que j'en rachetois partout les exemplaires au plus haut prix % Et où aurois- je trouvé les trésors que ces rachats m'au- roient supposés ? J'avois voulu réimprimer Y Essai sous Buonaparte , comme on vient de le voir : je n'en faisois donc pas un secret.

Quoi qu'il en soit, les mains officieuses qui firent d'abord circuler Y Essai historique, per- dirent leur travail : on s'aperçut que l'ouvrage lu de suite produisoit un effet contraire à celui qu'on en espéroit. Il fallut en venir au parti moins loyal, mais plus sûr, de ne le donner que par lambeaux , c'est-à-dire d'en montrer le mal , et d'en cacher le bien.

a On vint un jour me proposer de racheter, à une vente, un exemplaire de l'Essai pour 300 francs. Je répondis que j'en avois deux exemplaires que je don- nerais pour cent sous.

�� �