Aller au contenu

Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t2.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
214
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

sons de campagne, ses parcs, dont l’eau de la Tamise, refoulée par le flux, baigne deux fois le jour les arbustes et les gazons. Au milieu de ces deux points opposés, Richmond et Greenwich, Londres confond toutes les choses de cette double Angleterre : à l’ouest l’aristocratie, à l’est la démocratie, la Tour de Londres et Westminster, bornes entre lesquelles l’histoire entière de la Grande-Bretagne se vient placer.

Je passai une partie de l’été de 1799 à Richmond avec Christian de Lamoignon, m’occupant du Génie du christianisme. Je faisais des nagées en bateau sur la Tamise, ou des courses dans le parc de Richmond. J’aurais bien voulu que le Richmond-lès-Londres fût le Richmond du traité Honor Richemundiæ, car alors je me serais retrouvé dans ma patrie, et voici comment : Guillaume le Bâtard fit présent à Alain, duc de Bretagne, son gendre, de quatre cent quarante-deux terres seigneuriales en Angleterre, qui formèrent depuis le comté de Richmond[1] : les ducs de Bretagne, successeurs d’Alain, inféodèrent ces domaines à des chevaliers bretons, cadets des familles de Rohan, de Tinténiac, de Chateaubriand, de Goyon, de Montboucher. Mais, malgré ma bonne volonté, il me faut chercher dans le Yorkshire le comté de Richmond érigé en duché sous Charles II pour un bâtard : le Richmond sur la Tamise est l’ancien Sheen d’Édouard III.

Là expira, en 1377, Édouard III, ce fameux roi volé par sa maîtresse Alix Pearce, qui n’était plus Alix ou Catherine de Salisbury des premiers jours de la vie du vainqueur de Crécy : n’aimez qu’à l’âge où vous

  1. Voir le Domesday book. Ch.