Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t2.djvu/321

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
299
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

ques : elle se hâtait de se cacher dans une terre qu’elle n’avait possédée qu’un moment, comme sa vie. J’avais lu sur le coin d’une cheminée du château ces méchantes rimes attribuées à l’amant de Gabrielle :

La dame de Fervacques
Mérite de vives attaques.

Le soldat-roi en avait dit autant à bien d’autres : déclarations passagères des hommes, vite effacées et descendues de beautés en beautés jusqu’à madame de Custine. Fervacques a été vendu.

Je rencontrai encore la duchesse de Châtillon[1], laquelle, pendant mon absence des Cent-Jours, décora ma vallée d’Aulnay. Madame Lindsay[2], que je n’avais cessé de voir, me fit connaître Julie Talma[3]. Madame de Clermont-Tonnerre m’attira chez elle. Nous avions une grand’mère commune, et elle voulait bien m’appeler son cousin. Veuve du comte de Clermont-Ton-

  1. Depuis, Mme  de Bérenger.
  2. D’après Sainte-Beuve, l’original d’Ellénore, dans l’Adolphe de Benjamin Constant, était Mme  Lindsay.
  3. Louise-Julie Careau, première femme de Talma, qu’elle avait épousé le 19 avril 1791. Le 6 février 1801, « sur leur demande mutuelle, faite à haute voix », le maire du Xe arrondissement de Paris, prononça entre eux le divorce. Talma se remaria l’année suivante (16 juin 1802) avec une de ses camarades de la Comédie-Française, Charlotte Vanhove, femme divorcée de Louis-Sébastien-Olympe Petit. Une séparation à l’amiable ne tarda pas du reste à éloigner l’un de l’autre Mlle  Vanhove et Talma. Quant à Julie Talma, elle mourut en 1805. D’après Benjamin Constant, qui parle d’elle dans ses Mélanges de littérature et de politique, c’était une espèce de philosophe, un esprit « juste, étendu, toujours piquant, quelquefois profond » ; elle « avait, ajoute son panégyriste, une raison exquise qui lui avait indiqué les opinions saines ».