Page:Chateaubriand - Mémoires d’outre-tombe t2.djvu/471

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
441
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

d’une grosse pierre retirée de la fosse, et dont on aurait écrasé la tête du patient. Enfin, le duc de Rovigo devait s’être vanté de posséder quelques dépouilles de l’holocauste : j’ai cru moi-même à ces bruits ; mais les pièces légales prouvent qu’ils n’étaient pas fondés.

Par le procès-verbal, en date du mercredi 20 mars 1816, des médecins et chirurgiens, pour l’exhumation du corps, il a été reconnu que la tête était brisée, que la mâchoire supérieure, entièrement séparée des os de la face, était garnie de douze dents ; que la mâchoire inférieure, fracturée dans sa partie moyenne, était partagée en deux, et ne présentait plus que trois dents.

Le corps était à plat sur le ventre, la tête plus basse que les pieds ; les vertèbres du cou avaient une chaîne d’or.

Le second procès-verbal d’exhumation (à la même date, 20 mars 1816), le procès-verbal général, constate qu’on a retrouvé, avec les restes du squelette, une bourse de maroquin contenant onze pièces d’or, soixante-dix pièces d’or renfermées dans des rouleaux cachetés, des cheveux, des débris de vêtements, des morceaux de casquette portant l’empreinte des balles qui l’avaient traversée.

Ainsi, M. de Rovigo n’a rien pris des dépouilles ; la terre qui les retenait les a rendues et a témoigné de la probité du général ; une lanterne n’a point été attachée sur le cœur du prince, on en aurait trouvé les fragments, comme ceux de la casquette trouée ; une grosse pierre n’a point été retirée de la fosse ; le feu du piquet à six pas a suffi pour mettre en pièces la