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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

voueront aux ordres du chef devant qui les siècles ne sont qu’un moment, et l’espace qu’un point. »

Napoléon répondit :

« Gentilshommes, députés de la Confédération de Pologne, j’ai entendu avec intérêt ce que vous venez de me dire. Polonais, je penserais et agirais comme vous ; j’aurais voté comme vous dans l’assemblée de Varsovie. L’amour de son pays est le premier devoir de l’homme civilisé.

« Dans ma situation, j’ai beaucoup d’intérêts à concilier et beaucoup de devoirs à remplir. Si j’avais régné pendant le premier, le second, ou le troisième partage de la Pologne, j’aurais armé mes peuples pour la défendre.

« J’aime votre nation ! Pendant seize ans j’ai vu vos soldats à mes côtés, dans les champs d’Italie et dans ceux de l’Espagne. J’applaudis à ce que vous avez fait ; j’autorise les efforts que vous voulez faire : je ferai tout ce qui dépendra de moi pour seconder vos résolutions.

« Je vous ai tenu le même langage dès ma première entrée en Pologne. Je dois y ajouter que j’ai garanti à l’empereur d’Autriche l’intégrité de ses domaines, et que je ne puis sanctionner aucune manœuvre, ou aucun mouvement qui tende à troubler la paisible possession de ce qui lui reste des provinces de la Pologne.

« Je récompenserai ce dévouement de vos contrées, qui vous rend si intéressants et vous acquiert tant de titres à mon estime et à ma protection, par tout ce qui pourra dépendre de moi dans les circonstances. »

Ainsi crucifiée pour le rachat des nations, la Po-