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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

logne a été abandonnée ; on a lâchement insulté sa passion ; on lui a présenté l’éponge pleine de vinaigre, lorsque sur la croix de la liberté elle a dit : « J’ai soif, sitio. » « Quand la liberté, s’écrie Mickiewicz, s’assiéra sur le trône du monde, elle jugera les nations. Elle dira à la France : Je t’ai appelée, tu ne m’as pas écoutée : va donc à l’esclavage. »

« Tant de sacrifices, tant de travaux, » dit l’abbé de Lamennais, « doivent-ils être stériles ? Les sacrés martyrs n’auraient-ils semé dans les champs de la patrie qu’un esclavage éternel ? Qu’entendez-vous dans ces forêts ? Le murmure triste des vents. Que voyez-vous passer sur ces plaines ? L’oiseau voyageur qui cherche un lieu pour se reposer. »


Le 9 mai 1812, Napoléon partit pour l’armée et se rendit à Dresde[1]. C’est à Dresde qu’il rassembla les ressorts épars de la Confédération du Rhin, et que, pour la première et la dernière fois, il mit en mouvement cette machine qu’il avait fabriquée.

Parmi les chefs-d’œuvre exilés qui regrettent le soleil de l’Italie, a lieu une réunion de l’empereur Napoléon et de l’impératrice Marie-Louise, de l’empereur et de l’impératrice d’Autriche, d’une cohue de souverains grands et petits[2]. Ces souverains aspirent à former de leurs diverses cours les cercles subordonnés de la cour première : ils se disputent le vasselage ; l’un

  1. Il y arriva le 16 mai.
  2. Les princes de Weimar, de Cobourg, de Mecklembourg ; le grand-duc de Wurtzbourg, primat de la Confédération du Rhin, la reine Catherine de Westphalie, le roi de Prusse et son fils le prince royal.