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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

prélat marié, s’était rendu à la dérobée au congrès de Châtillon, en chuchoteur non avoué de la légitimité. Cette précaution apportée, le prince, afin de se tirer d’embarras à Paris, eut recours à un de ces tours dans lesquels il était passé maître.

M. Laborie[1], devenu peu après, sous M. Dupont de Nemours[2], secrétaire particulier du gouvernement provisoire, alla trouver M. de Laborde[3], attaché à la garde nationale ; il lui révéla le départ de M. de Talleyrand : « Il se dispose, lui dit-il, à suivre la régence ; il vous semblera peut-être nécessaire de l’arrêter, afin d’être à même de négocier avec les alliés, si besoin est. » La comédie fut jouée en perfection.

    provisoire (16 avril 1814). Pendant les Cent-Jours, il essaya d’organiser la résistance dans le Midi, fut arrêté et enfermé à Vincennes, puis à l’Abbaye. Un ordre de Fouché lui rendit la liberté après Waterloo. Député de 1815 à 1816, ministre d’État et membre du Conseil privé (septembre 1816), il devint le principal agent de la politique personnelle de Monsieur. En 1818, il perdit son titre de secrétaire d’État, que le roi ne lui rendit que le 7 janvier 1824. Il fut nommé, en 1827, ministre plénipotentiaire à Florence et fut appelé à la pairie le 7 janvier 1830. La chute de la branche aînée le rendit à la vie privée. Il a laissé des Mémoires aussi intéressants que spirituels.

  1. Sur Laborie, voir la note 1 de la page 268 du tome II (note 31 du Livre Premier de la Deuxième partie).
  2. Pierre-Samuel Dupont de Nemours (1739-1817). Il avait fait partie de la Constituante et du Conseil des Anciens. Sous le Consulat et l’Empire, il refusa les fonctions publiques que Napoléon lui offrit. Au mois d’avril 1814, il accepta la place de secrétaire du gouvernement provisoire et fut nommé par Louis XVIII conseiller d’État et intendant de la marine à Toulon. Quand Napoléon revint de l’île d’Elbe, Dupont de Nemours s’embarqua pour l’Amérique, où il avait déjà habité, de 1799 à 1802, et où ses deux fils dirigeaient une importante exploitation agricole. Une chute qu’il fit dans une rivière et les attaques de la goutte dont il souffrait depuis longtemps l’enlevèrent deux ans après (6 août 1817).
  3. Sur M. de Laborde, voir ci-dessus la note 1 de la page 251 (note 245 du Livre Premier de la Troisième Partie).