Les esprits indépendants de toute nuance et de toute opinion tenaient un langage uniforme à l’époque de la publication de ma brochure. La Fayette, Camille Jordan, Ducis, Lemercier, Lanjuinais, madame de Staël, Chénier, Benjamin Constant, Le Brun, pensaient et écrivaient comme moi. Lanjuinais disait : « Nous avons été chercher un maître parmi les hommes dont les Romains ne voulaient pas pour esclaves. »
Chénier ne traitait pas Bonaparte avec plus de faveur :
Un Corse a des Français dévoré l’héritage.
Élite des héros au combat moissonnés,
Martyrs avec la gloire à l’échafaud traînés,
Vous tombiez satisfaits dans une autre espérance.
Trop de sang, trop de pleurs ont inondé la France.
De ces pleurs, de ce sang un homme est l’héritier.
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Crédule, j’ai longtemps célébré ses conquêtes,
Au forum, au sénat, dans nos jeux, dans nos fêtes.
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Mais, lorsqu’en fugitif regagnant ses foyers,
Il vint contre l’empire échanger des lauriers,
Je n’ai point caressé sa brillante infamie ;
Ma voix des oppresseurs fut toujours ennemie ;
Et, tandis qu’il voyait des flots d’adorateurs
Lui vendre avec l’État des vers adulateurs,
Le tyran dans sa cour remarqua mon absence ;
Car je chante la gloire et non pas la puissance.
Madame de Staël portait un jugement non moins rigoureux de Napoléon :