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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

son côté M. de Talleyrand retranchait de la liste ou ajoutait au catalogue tel ou tel proscrit, selon son caprice. Le faubourg Saint-Germain n’avait-il pas bien raison de croire en M. Fouché ?

M. de Saint-Léon à Vienne apportait trois billets dont l’un était adressé à M. de Talleyrand : le duc d’Otrante proposait à l’ambassadeur de Louis XVIII de pousser au trône, s’il y voyait jour, le fils d’Égalité. Quelle probité dans ces négociations ! qu’on était heureux d’avoir affaire à de si honnêtes gens ! Nous avons pourtant admiré, encensé, béni ces Cartouche ; nous leur avons fait la cour ; nous les avons appelés monseigneur ! Cela explique le monde actuel. M. de Montrond vint de surcroit après M. de Saint-Léon[1].

M. le duc d’Orléans ne conspirait pas de fait, mais de consentement ; il laissait intriguer les affinités révolutionnaires : douce société ! Au fond de ce bois, le plénipotentiaire du roi de France prêtait l’oreille aux ouvertures de Fouché.

À propos de l’arrestation de M. de Talleyrand à la

    ne rentra en France qu’après la révolution de Juillet. Napoléon III en fit un sénateur et un grand officier de la Légion d’honneur. Thibaudeau a laissé de nombreux écrits : Mémoires sur la Convention et le Directoire (1824) ; Mémoires sur le Consulat (1826) ; Histoire générale de Napoléon Bonaparte (1827-1828) ; le Consulat et l’Empire ou Histoire de France et de Napoléon Bonaparte, de 1799 à 1815 (1837-1838, 10 vol. in-8o) ; Histoire des États généraux (1843).

  1. M. de Saint-Léon était une créature de Fouché ; M. de Montrond était un des familiers de Talleyrand, et le plus spirituel de tous. Avec lui, le prince n’avait jamais le dernier mot. — « Savez-vous, duchesse, pourquoi j’aime assez Montrond ? disait un jour M. de Talleyrand ; c’est parce qu’il n’a pas beaucoup de préjugés. » — « Savez-vous, duchesse, pourquoi j’aime tant M. de Talleyrand ? ripostait Montrond ; c’est qu’il n’en a pas du tout. »