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LIVRE DEUXIÈME

L’abbé menaça ses religieux d’informer le roi de leur dérèglement : ce nom du roi avait pénétré au fond des plus obscures retraites.

Jusque alors nous n’avions senti que le despotisme irrégulier des rois qui marchaient à regret avec des libertés publiques, ouvrages des états généraux et exécutées par les parlements ; mais la France n’avait point encore obéi à ce grand despotisme qui imposait l’ordre sans permettre d’en discuter les principes. Sous Louis XIV, la liberté ne fut plus que le despotisme des lois, au-dessus desquelles s’élevait, comme régulateur, l’inviolable arbitraire. Cette liberté esclave avait quelques avantages : ce qu’on perdait en franchises dans l’intérieur, on le gagnait au dehors en domination : le Français était enchaîné, la France libre.

Les moines donnèrent à regret leur consentement à la réforme. Un contrat fut passé ; 400 livres de pension furent accordées à chacun des sept demeurants, avec permission de rester dans l’enceinte de l’abbaye ou de se retirer ailleurs ; le contrat mutuel fut homologué au parlement de Paris, le 6 février 1663.

Rancé était toujours perplexe sur lui-même. Deux frères de l’Étroite Observance, appelés de