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Page:Chateaubriand - Vie de Rancé, 2è édition, 1844.djvu/210

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VIE DE RANCÉ

clochers de paille tordus par la fumée ; des nuages abaissés filaient comme une vapeur blanche au plus bas des vallons. En approchant, ces nuées se métamorphosaient en personnes vêtues de laine écrue ; je distinguais des faucheurs : madame de La Vallière ne se trouvait point parmi les herbes coupées.

Rancé s’était résolu à ne composer aucun ouvrage qui rappelât son existence. À soixante ans, accablé d’infirmités, il n’était pas tenté de retourner aux illusions de sa jeunesse, malgré les encouragements qu’il trouvait dans les cheveux blancs de son ami Bossuet. Comme il faisait souvent des conférences à ses frères, il lui restait une quantité de discours. Il se laissa entraîner à la prière d’un religieux malade qui le conjurait de rassembler ces discours. Ainsi se trouva formé peu à peu le traité qu’il intitula De la sainteté et des devoirs de la vie monastique. On fit dans le couvent plusieurs copies de ce traité ; une de ces copies tomba entre les mains de Bossuet : Bossuet, émerveillé, se hâta d’écrire à Rancé qu’il exigeait que son ouvrage fût rendu public et qu’il se chargeait de le faire imprimer. Dom Rigobert et l’abbé de Châtillon mêlèrent leurs sollicitations à celles du grand évêque. Rancé avait jeté l’ouvrage au