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VIE DE RANCÉ

leur demeure ; ils se renferment dans les montagnes comme entre des murs inaccessibles ; ils se font des églises de tous les lieux où ils se rencontrent ; ils se reposent sur les collines comme des colombes, ils se tiennent comme des aigles sur la cime des rochers ; leur mort n’est ni moins heureuse ni moins admirable que leur vie, raconte saint Ephrem. Ils n’ont aucun soin de se construire des tombeaux ; ils sont crucifiés au monde ; plusieurs, étant attachés comme à la pointe des rochers escarpés, ont remis volontairement leur âme entre les mains de Dieu. Il y en a qui, se promenant avec leur simplicité ordinaire, sont morts dans les montagnes qui leur servaient de sépulcre. Quelques-uns, sachant que le moment de leur délivrance était arrivé, se mettaient de leurs propres mains dans le tombeau. Il s’en est trouvé qui en chantant les louanges de Dieu ont expiré dans l’effort de leur voix, la mort seule ayant terminé leur prière et fermé leur bouche. Ils attendent que la voix de l’archange les réveille de leur sommeil ; alors ils refleuriront comme des lis d’une blancheur, d’un éclat et d’une beauté infinis. »

Après cette description admirable pour leur