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VIE DE RANCÉ

Les scolies dans l’Anacréon de Rancé suivent une à une les odes : les pièces à la louange du jeune traducteur, imprimées à la tête de l’ouvrage, ne donnent guère une idée de l’avenir du saint. Dans les collèges il y avait une sorte d’enfance mythologique, qui passait d’une génération à l’autre. « Quels vœux formes-tu, chantre de Téos ? dit un des rapsodes de ces pièces, brûles-tu pour Bathille, pour Bacchus, pour Cythérée ? Aimes-tu les danses des jeunes vierges, voici Armand (de Rancé) qui l’emporte sur Bathille et sur les jeunes vierges ; si tu possèdes Armand, vis heureux. »

Singulière annonciation du saint. Je me souviens qu’un de nos régents nous expliquait en classe l’églogue d’Alexis : Alexis était un écolier indocile, qui refusait d’écouter les paroles de son affectueux maître. Candide pudeur chrétienne !

Rancé subséquemment jeta au feu ce qu’il lui restait du tirage de l’ Anacréon, dont on trouve néanmoins des exemplaires à la Bibliothèque du roi. Un voyageur anonyme, qu’on sait être aujourd’hui l’abbé Nicaise, dans un voyage fait à La Trappe du vivant de Rancé, raconte une conversation qu’il eut avec l’abbé. Celui-ci lui dit : « qu’il n’avait gardé dans sa bibliothèque qu’un