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LIVRE QUATRIÈME

pour ces hommes d’eux-mêmes : c’était toujours de Dieu dont ils parlaient. Ces souvenirs que Rancé envoyait aux océans par un missionnaire se rattachaient à son arrière vie, lorsqu’il avait songé à cacher ses blessures parmi les pasteurs de l’Himalaya. Tous les rivages sont bons pour pleurer. Il aurait vu, s’il avait suivi ses premiers desseins, ces rizières abandonnées quand l’homme qui les sema est passé depuis longtemps ; il aurait suivi des yeux ces Aras blancs qui se reposent sur les manguiers du tombeau de Tadjmabal ; il aurait retrouvé tout ce qu’il eût aimé dans son jeune âge, la gloire des palmiers, leur feuillage et leurs fruits : il se serait associé à cet Indien qui appelle ses parents morts aux bouches du Gange, et dont on entend la nuit les chants tributaires qu’accompagnent les vagues de la mer Pacifique.

On ne sait si Rancé avait entretenu un commerce de lettres avec l’abbesse des Clairets, comme il en avait entretenu un avec Louise Roger de La Mardellière, mère du comte de Charnz par Gaston. Peut-être qu’en cherchant bien on pourrait retrouver quelques-unes des lettres que Rancé écrivait dans sa jeunesse à madame de Montbazon, mais je n’ai plus le temps de m’occuper de ces