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LIVRE DEUXIÈME

chant, que chacun faisait des vœux pour l’avoir auprès de soi au moment suprême. On croyait ne pouvoir bien mourir qu’entre ses mains, comme d’autres y avaient voulu vivre, Gaston avait à peine rendu le dernier soupir que ses familiers l’abandonnèrent, Rancé fut laissé presque seul auprès du cadavre. Il ne suivit pas le corps du prince à Saint-Denis ; mais il présenta le faible cœur de Gaston aux jésuites de Blois : le cœur intrépide de Henri IV avait été porté aux jésuites de La Flèche. Le Bouthillier courut ensuite s’ensevelir au Mans, y demeura caché deux mois ; il changea même de nom, comme s’il eût craint d’être reconnu et arrêté aux portes du ciel.

Le projet qu’il méditait depuis longtemps de soumettre sa conduite future au conseil des évêques d’Aleth et de Comminges lui revenait dans l’esprit. Il se résolut de l’accomplir. Le 21 juin 1660, il écrivit à la mère Louise : « Je pars demain à l’insu de tous mes amis. » Il arriva à Comminges le 27 du même mois, après un tremblement de terre : ce fut de même que j’arrivai à Grenade en rêvant de chimères, après le bouleversement de la Véga.

L’évêque de Comminges était absent ; Rancé l’attendit. Quand il revint, l’évêque commença