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VIE DE RANCÉ

pris des choses du monde. Quelle leçon, monsieur, pour ceux qui sont persuadés de son néant et qui travaillent pour s’en déprendre ! Ce pauvre prince dit le matin du jour de sa mort ces mesmes mots : Domus mea domus desolationis ; et comme on luy voulut dire qu’il n’estoit pas si mal qu’il pensoit, il répliqua : Solum mihi superest sepulchrum ; ensuite il demanda l’extrême-onction, et dit qu’il estoit résolu à la volonté de Dieu ; enfin je suis persuadé qu’il luy a fait miséricorde. Je ne puis vous mander les circonstances de sa mort ; j’écris de Blois, malade d’un rhume qui me cause une oppression qui m’empesche d’escrire. Je vous supplie de demander à Dieu et de luy faire demander pour moy qu’il me fasse la grâce de retirer tout le bien et l’avantage que je dois d’une rencontre aussi touchante que celle-là l’est. Je reviens à la mort de ce pauvre prince : la désolation qui parut dans sa maison, qui retentissoit de plaintes et de gémissements au moment de sa mort, l’esprit humain ne se sçauroit rien figurer de si pitoyable, je confesse que j’en suis accablé de douleur.»

Rancé se montra dans cette occasion si tou-