Le Lierre.
Un gracieux, jeune et beau lierre
D’une ruine était l’assidu protecteur,
Contr’elle quand le vent déchaînait sa colère,
De ses bras vigoureux il enlaçait son cœur.
Quelque temps la vieille ruine
Pimpante se targua de son nouveau printemps,
Mais cœur de pierre est froid, le lierre, j’imagine,
Vit que l’on dédaignait ses vifs embrassements.
Cependant il passe l’éponge
Sur ce travers humain, et fort de son amour,
Il s’y cramponne ferme, il s’étend, et s’allonge
Lui formant de ses bras un magnifique atour.
Un soir autour de la ruine
(C’était au temps d’hiver), que vents et que frimas
Soufflaient,—d’un doux esprit gémit la voix divine
Sur cet amour si pur souriant au trépas ;
Mais las ! cet avis prophétique
Ne fut point entendu, ne fut d’aucun secours,
Et plus il rapprochait le moment fatidique,
Plus de ses bras le lierre étreignait ses amours.
Il portait la ruine encore
Quand un son s’entendit crescendo, crescendo,
Qui filait à travers chaque voûte sonore,
C’était son glas funèbre et dernier memento.
Cette chère vieille ruine
Chancela, puis tombant, s’affaissa tout à coup,
Elle narguait le temps vu sa haute origine,
Clochers et clochetons rien n’en resta debout.