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Page:Chatelain - Beautés de la poésie anglaise, tome 1, 1860.djvu/53

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Si sur vous la fortune aveugle se déchaîne,
Et si votre nacelle, encor fringante hier,
Aujourd’hui par les vents est jetée à la mer,
Que vers le noir abîme un courant vous entraîne,
Lèverez-vous en haut la tête vers les cieux,
En disant : « Affrontons le coup de vent tous deux ! »

Doucettement vient l’âge avec cheveux de neige,
Avec rides au front, et des pas chancelants,
Lèvre pâle, et des yeux veufs de rayons brillants,
Et des infirmités le déplaisant cortège :
Alors penserez-vous à vos jeunes printemps,
Afin qu’amour pour vous triomphe encor du temps ?

Ne le faites légèrement. !… c’est chose sainte,
Ce serment… il n’est pas un mot vide de sens,
Hommes, anges, voyez ! écoutent vos accents,
Le bon Dieu les entend de son auguste enceinte :
Agenouillez-vous donc, époux, à son autel,
Et gardez à jamais ce serment solennel !



L’Épousée-Démon.[1]


Dans ces temps justement nommés la nuit des âges,
De l’Allemagne au pays merveilleux,
Dans une chambre obscure au plus haut des étages
Près d’un plateau taché d’un sang cadavéreux,
À la main le scalpel rouge de ses carnages,
Se tient là froid le disséqueur,
Prêt à fouiller un crâne, ou bien sonder un cœur.

Il était déjà tard,—si que ses camarades
Étaient partis. Seul devant le plateau
Avec étonnement le virent les Pléïades ;

  1. Trouvé dans les papiers d’un médecin.