que je réveillerai toute la compagnie ;
mais il ne s’agira point de philosophie,
physique ou aucuns mots de loi étranges
car il n’est guère de latin en mon gésier. »
Un marchand autrefois vivait en Saint-Denis
qui riche était (et pour ce le tenait-on sage).
Or une femme avait, d’excellente beauté,
mais aimant compagnie, et moult joyeuseté ;
et cette chose-là cause plus grand’ dépense
que n’en valent toute la chère et tout l’honneur
qu’hommes leur font dans les festins et dans les danses ;
car salutations et belles contenances
passent comme ombres font devant un mur ;
mais malheur à celui qui doit payer pour elles !
« Bon homme de mari doit tout payer toujours ;
lui faut nous habiller, lui faut nous[1] arroyer[2],
bien richement, pour se faire à soi-même honneur,
en quel arroi nous danserons gaillardement.
Et s’il n’y peut contribuer, par aventure,
ou s’il ne veut endurer la dépense,
mais croit que c’est argent gâté en pure perte,
alors faudra qu’un autre paie pour tous nos frais,
ou nous prête son or — et là gît grand péril. »
Ce notable marchand tenait brave demeure,
et donc avait toujours si grand concours de gens
pour sa largesse, — et pour ce que sa femme était jolie,
que c’en était merveille. Or écoutez mon dit.
Dans tout ce monde-là, hôtes petits et grands,
un moine se trouvait, homme bel et hardi,