« Maintenant, seyons-nous, et buvons, et gaudissons-nous
et ensuite nous enterrerons son corps. »
El à ces mots il lui arriva par hasard
de prendre la bouteille où était le poison,
il but et offrit aussi à boire à son camarade,
de quoi aussitôt ils moururent tous les deux.
Mais, certes, je suppose qu’Avicennes
ne décrivit jamais, dans un canon ni aucun fen[1],
de plus merveilleux signes d’empoisonnement
que n’en eurent ces deux misérables avant leur fin.
Ainsi finirent ces deux homicides
et pareillement le perfide empoisonneur aussi.
Ô péché maudit, plein de malédiction !
Ô traîtres homicides, ô méchanceté !
Ô gloutonnerie, luxure et jeu !
Ô toi qui blasphèmes le Christ avec vilenie
et avec de grands jurements, par habitude et par orgueil !
Ô péché maudit, plein de malédiction !
Hélas ! genre humain, comment se peut-il
qu’envers ton créateur qui t’a façonné,
et du sang précieux de son cœur t’a racheté,
tu sois si félon et si méchant, hélas !
Or, braves gens, Dieu vous pardonne vos fautes,
et vous garde du péché d’avarice.
Mon saint pardon peut vous guérir tous
pourvu que vous m’offriez des doubles d’or ou des esterlins,
ou encore des broches d’argent, des cuillers ou des anneaux ;
courbez la tête sous cette sainte bulle !
Venez, femmes, offrez de votre laine.
J’inscris ici vos noms sur mon rôle tout de suite ;
à la béatitude céleste vous arriverez ;
je vous absous par mon grand pouvoir,
vous qui allez faire offrande, et vous rends aussi purs et nets
qu’à votre naissance. Et voilà, messires[2], comment je prêche ;
et Jésus-Christ, qui est le mire de nos âmes,
vous accorde ainsi de recevoir son pardon.