Et il avait été naguère* en chevauchée
en Flandres, en Artois, et Picardie,
et fait bonne figure, pour si petit espace*,
dans l’espoir de se mettre en la faveur de sa dame.
Il était brodé, comme l’est une prairie
toute pleine de fraîches fleurs, blanches et rouges.
Il allait chantant, ou flûtant, tout le jour ;
il était aussi frais que l’est le mois de mai.
Courte était sa robe*, avec manches longues et larges.
Bien savait-il se tenir à cheval, et bien chevaucher.
Il savait faire chansons, et bien composer,
joûter et aussi danser, et bien portraire et écrire.
Si chaudement il aimait, que nuitamment
il ne dormait pas plus que ne fait un rossignol.
Courtois il était, humble et serviable,
et tranchait* devant son père à la table.
Il avait un Yeoman[1] et de serviteurs pas davantage
en ce moment, car il lui plaisait chevaucher ainsi.
Et celui-ci était vêtu d’une veste et d’un chaperon verts ;
une gerbe de flèches de paon, brillantes et aiguës,
sous son ceinturon il portait moult soigneusement ;
bien savait-il dresser ses armes, en bon archer ;
ses flèches ne retombaient pas les plumes en bas*,
et dans sa main il portait un arc puissant.
Il avait la tête ronde, avec le visage brun.
De l’art des forêts il savait bien toute la science.
Sur son bras il portait un beau brassard
et à son côté une épée et un bouclier,
et de l’autre côté une belle dague
bien harnachée, et acérée comme pointe de lance ;
un Christophe[2] d’argent sur sa poitrine brillait.
Il portait un cor, le baudrier était de vert ;
c’était un forestier, vraiment, ce me semble.
Il y avait aussi une nonne, une Prieure,
de qui le sourire* était moult simple et discrète ;
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LES CONTES DE CANTERBURY.