Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/475

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et ils descendirent là où ils voulaient séjourner,
et c’était, comme les livres me le rappellent,
la froide saison glacée de décembre.
Phébus devenait vieux, et prenait une teinte de laiton,
lui qui, dans sa chaude déclinaison,
brillait comme de l’or brûlant, avec des rayons éclatants :
mais maintenant dans le Capricorne il descendait[1],
où il brillait très pâle, je puis bien dire.
1250 Les gelées mordantes, avec le verglas et la pluie,
ont détruit la verdure dans tous les jardins.
Janus est assis à côté du feu avec sa double barbe[2],
et boit le vin dans son cor de chasse.
Devant lui est placée la chair du sanglier aux fortes défenses,
et « Noël » est le cri de tout homme joyeux[3].

Aurélius, en tout ce qu’il peut,
offre à son maître bon visage et révérence,
et il le prie de faire diligence
pour le tirer de sa peine cruelle,
1260 ou qu’avec une épée il lui fende le cœur.
Le clerc subtil avait tant pitié de cet homme,
que nuit et jour il s’employait autant qu’il le pouvait
à guetter le moment d’accomplir son œuvre ;
c’est-à-dire de produire telle illusion
par des apparences ou de la jonglerie
— je ne connais pas les termes d’astrologie —
qu’elle, et tout le monde, s’imaginerait et dirait
que de la Bretagne les rochers avaient disparu.
1270 Or, à la fin, il a trouvé son temps
pour faire ses tours et son œuvre misérable
d’une telle superstition maudite.
Il apporta ses tables tolétanes[4],

  1. Au temps de Chaucer, le soleil entrait dans le Capricorne le 13 décembre.
  2. Janus annonce rapproche de Janvier.
  3. Cette description de l’hiver, d’ailleurs très pittoresque en soi, n’a rien à voir avec le conte du Franklin. Elle s’explique par contamination de la donnée de Chaucer avec celle qui a servi à Boccace. Dans Boccace la condition posée par la dame est que l’amoureux fasse fleurir son jardin au mois de janvier.
  4. Tables astronomiques, composées par Alphonse X de Castille, et adaptées à la longitude et la latitude de Tolède, d’où leur nom. Elles servaient à calculer le mouvement des planètes pendant une période donnée.
    Tout le passage qui suit (v. 1 273 à 1 293) est plein d’indications, de calculs