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Page:Chaucer - Les Contes de Canterbury.djvu/62

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LES CONTES DE CANTERBURY.

Il lui sembla que son cœur allait se briser,
quand il les vit si piteuses et si abattues,
elles qui jadis étaient de si haut rang,
et dans ses bras il les releva toutes,
et les réconforta en toute bonne intention,
et jura par serment, comme il était vrai chevalier,
960qu’il mettrait si avant sa force,
pour les venger du tyran Créon,
que toute la Grèce dirait
comment Créon fut par Thésée servi
en homme qui a pleinement mérité sa mort.
Et sur-le-champ, sans autre délai,
il déploie sa bannière, et le voilà chevauchant
vers Thèbes, avec toute son armée ;
il ne voulut s’approcher davantage d’Athènes à pied ou à cheval,
ni prendre pleinement son aise un demi-jour,
970mais se mit en marche et, sur la route, passa cette nuit-là.
Et il envoya aussitôt la reine Hippolyte
et Émilie sa jeune sœur brillante
séjourner dans la ville d’Athènes ;
et lui chevaucha de l’avant ; il n’est rien de plus à dire.

    La rouge image de Mars, avec lance et écu,
brille à ce point, sur sa grande bannière blanche,
que tout le champ[1] en étincelle alentour ;
et, à côté de sa bannière, est porté son pennon
tout riche de lames d’or battu qui figuraient
980le Minotaure qu’il tua en Crète.
Ainsi chevauchait le duc, ainsi chevauchait le conquérant,
avec une armée où était la fleur de la chevalerie,
jusqu’à ce qu’il fût arrivé à Thèbes, et mit pied à terre
heureusement dans une plaine où il pensait livrer bataille
Pour parler brièvement de ces choses,
contre Créon, qui était roi de Thèbes,
il combattit et le tua valeureusement, en chevalier,
dans une lutte loyale, et mit ses gens en fuite ;
puis il prit la ville d’assaut,
990et fit crouler murs et poutres et solives ;

  1. Le champ, c’est-à-dire le fond (de la bannière) ; terme de blason.