pour aller, disoient-ils, au secours du saint monarque. Chacun s’empressoit de fournir à leur assistance. De-là ce bruit populaire que les vivres se multiplioient entre leurs mains ; les sots & les esprits crédules ont toujours accrédité les miracles ; voilà pourquoi ils ont été si communs dans les siecles de fanatisme & d’ignorance, & que de nos jours ils sont devenus si rares, & que personne ne s’avise plus d’en faire.
On vit en peu de tems cette troupe de paysans abusés, grossie d’une multitude infinie de vagabonds, de voleurs, de bannis, d’excommuniés, de femmes perdues de débauches, & de tous ceux qu’en langue du tems on nommoit ribaux. Bientôt l’imposteur eut une armée de 100,000 hommes, qu’il distribua par compagnies sous différens chefs, avec 500 enseignes, où étoient représentés la croix, un agneau & les visions du prétendu prophete. On l’appelloit le maître de Hongrie. Deux autres scélérats commandoient sous lui avec la même qualité. Tous étoient armés d’épées, de poignards, d’arbaletes, de coignées, de massues & de tout ce qu’ils avoient pu ramasser. Quel contraste avec leurs enseignes, symboles de la douceur & de