modicité que nous venons de voir, il falloit des grands nombres pour énoncer des ſommes médiocres, & à plus forte celles qui durent être ordinaires dans un peuple devenu maître de toutes les richeſſes de la Terre. Cela dut obliger néceſſairement à des formules abrégées de compte. Il en eſt une non seulement si certaine mais encore si connue que je me diſpenserai de nommer même les Auteurs nombreux des témoignages précis deſquels je pourrois l’apuïer , c’eſt que lorſqu’on étoit arrivé au Million de Seſterces qui au long auroit voulu dire Decies centena Milita Seſtertiorum, ou ſe contentoit de dire Decies. Par la même abbreviation, Vicies vouloit dire deux Millions, Centies, dix Millions, Millies, cent millions &c.
Ces ſommes s’exprimoient également chez les Anciens au long & en chiffres. Les Romains pauvres s’étoient dabord contentés pour ces dernirs de ſix lettres de leur Alphabet : c’étoit l’I pour un, le V pour cinq, l’X pour dix, le C pour cent, le D pour cinq cens, & l’M pour Mille. Peu de ces lettres ſuffsisoient en effet pour exprimer de magasins pleins de leurs As ; mais la choſe devint différente lorſqu’on ne compta à Rome que par Millions : on inventa des ſignes arithmétiques nouveaux tres ſimples, mais non moins propres à exprimer les plus grandes ſommes. Ce font des ſortes de Virgules, ou plutôt des ſignes de Parenthéſe concentriques mis de l’un & de l’autre coté d’un I. un de ces ſignes d’un ſeul coté Iɔ marquoit cinq cens ; & le double s’il étoit de deux parts de cette manière clɔ. Ces
