toresque, à laquelle Jean Guilbault ne pouvait pas manquer de prendre un vif intérêt.
Il arrivait souvent que le médecin s’oubliait des soirées entières auprès du malade, à lui entendre dire des histoires de ses voyages. C’était tantôt un naufrage sur quelque ilot désert, tantôt un combat à coups de poings avec des matelots anglais sur les quais à Québec, tantôt quelque aventure sauvage sur les côtes du Labrador ou dans l’île d’Anticosti, tantôt quelque légende superstitieuse racontée par les pêcheurs acadiens de Gaspé ou des Iles de la Magdelaine ; car, avec sa goëlette, le capitaine Guillot avait déjà parcouru tous les parages du Golfe St. Laurent.
Un soir que Jean Guilbault était resté plus longtems qu’à l’ordinaire à causer avec son patient, celui-ci mentionna par hasard, le nom de M. Henri Voisin l’avocat.
— Comment ! vous connaissez M. Voisin, fit l’étudiant en médecine ; c’est un de mes amis.
— Parbleu, si je le connais ; je crois bien, puisque c’est mon cousin
— Ah ! diable, c’est votre cousin ?
— Mais oui, si bien que nous portons le même nom, bien sûr.
— Ça ne me paraît pas si sûr. Il s’appelle Voisin, et vous vous appelez Guillot.
— C’est à dire Voisin dit Guillot, ou Guillot dit Voisin, comme il vous plaira.
— Ah ! Ah !
— Oui, c’est de même. Connaissez-vous François Guillot, le commis de M. Wagnaër ?
— Un peu.
— C’est encore mon cousin. Son père, mon père, et le père de M. Voisin l’avocat, c’était les trois frères. Son père le bonhomme Henri Guillot, qu’on appelait Riochon Guillot,