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CHARLES GUÉRIN.

V.

LOUISE ET CLORINDE.



LE lendemain, Charles reçut la lettre suivante qui était bien la vingtième d’une correspondance très active entre lui et sa jeune sœur.


R… 16 janvier 1831.

« Mon bon Charles,

« Je t’écris encore aujourd’hui, puisque tu veux que je t’écrive toutes les semaines. Je t’assure que c’est une tâche bien douce, et, quoique je t’aie écrit la semaine dernière, il me semble qu’il y un mois. Ta dernière lettre était bien courte, tu dois avoir bien du temps à toi, et tu vas peut-être me gronder, mais on dirait que tu me négliges.

« Depuis ma dernière lettre, il s’est passé une chose qui nous a bien surpris et qui va beaucoup te surprendre. Dimanche dernier, M. Wagnaër et mademoiselle Clorinde sont venus nous faire visite. Tu peux croire, si j’étais embarrassée. Maman déteste tant ces gens-là ! Mais cette pauvre demoiselle a l’air si bonne et elle voulait tant se rendre aimable, que maman a fait bonne mine à son père par considération pour elle.

« Depuis la fois qu’il a demandé notre mère en mariage, M. Wagnaër, comme tu sais, n’avait pas mis les pieds dans la maison. On ne sait pas du tout ce que veut dire cette visite. Je pense que c’était seulement pour faire connaissance avec moi que Clorinde aura décidé son père à venir nous voir. Il n’y a que nous deux de jeunes filles de notre âge ici, et, comme