Page:Chauvet - L Inde française.djvu/162

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me faut entrer ici dans quelques développements sur l’organisation de la société indienne, telle que l’avaient trouvée les Français en prenant possession d’une partie du sol de la péninsule et telle qu’elle s’est maintenue depuis sans altération.

Cette société, essentiellement aristocratique et théocratique, repose tout entière sur le livre de Manou qui est pour les Indiens ce que le Koran est pour les populations musulmanes, c’est-à-dire un évangile réglant à la fois la vie sociale et la vie privée.

Manou, qui vivait huit ou neuf siècles avant l’ère chrétienne, avait donné pour pierre angulaire à son édifice le principe monarchique absolu.

Ce n’était pas seulement toute justice qui émanait du roi, c’était toute la vie humaine. C’était le droit de propriété et tout ce qui en découle. Manou organisait, en un mot, le despotisme sous sa forme la plus concrète.

Afin de garantir contre toute atteinte sa puissante organisation, Manou avait fractionné en castes innombrables les éléments de la population. Depuis le plus élevé jusqu’au plus infime, depuis le brahme jusqu’au paria, chacun était donc cantonné dans les liens étroits d’un formalisme stupide qui assouplissait les sujets à l’obéissance passive.

Cet état social fut scrupuleusement maintenu. Quand les Indiens se donnèrent à nous, car ils ne furent pas