Page:Chavette - Les Petites Comédies du vice, 1890.djvu/175

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écrire un interminable chant d’amour que le prochain navire de rencontre devait porter à Marie. — Le quatrième jour, il consentit à prendre un peu de café. — À la fin de la semaine, il avalait un bouillon, mais rien de plus, — son humeur était toujours mélancolique.

Quinze jours après notre départ, il m’adressa le premier la parole :

— Quand arriverons-nous ?

— Au plus vite, dans vingt-cinq jours ; mais à la condition que le temps nous sera toujours aussi favorable.

— C’est bien long.

— Et d’autant plus triste que, par extraordinaire, nous n’avons pas une seule passagère à bord pour égayer notre traversée. Ce voyage-ci ne procurera pas gros pourboires à la femme de chambre des premières… Vous souvenez-vous ? Celle que vous preniez pour un chauffeur et que vous traitiez de monstre ?

— Pauvre fille ! J’ai été bien sévère pour elle.

Puis, il ajouta :

— Elle est très douce et fort prévenante… Trouvez-vous ?

Cinq jours plus tard, je le vis, le matin, consultant sa montre.

— Vous comptez les heures bien lentes à passer ? lui dis-je.

— Non, je regarde si nous déjeunerons bientôt, car j’ai très faim.