Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/190

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autre chose que je ne savais pas encore, mais que j’ai apprise depuis, c’est que les vrais princes, ceux qui doivent régner, gesticulent peu, et que dans toutes les affaires de ce monde ils vont droit au fait. Or, dans ses jours de belle humeur, le bel Edwards trouvait un plaisir particulier à me débiter de longues tirades de vers anglais, en les accompagnant de grands gestes. C’est égal, les gestes ont leur charme ; et les siens me plaisaient.

— J’y suis enfin ! m’écriai-je. Le bel Edwards était un prince de théâtre en vacances, qui se servait de vous pour s’entretenir la main. »

Elle ne daigna pas me répondre.

« Je vous répète, poursuivit-elle, que pendant un mois il fut charmant. Et pourtant ma mère ne l’aimait pas ; elle me disait : « Cet homme-là me déplaît. » Je lui disais : « Pourquoi te déplaît-il ? » Elle me répondait : « Je ne sais pas pourquoi, mais il me déplaît. Il a dans l’œil quelque chose qui ne me va pas. Tu verras que c’est un mauvais génie, qu’il te jouera quelque tour ; tu ferais bien de t’en débarrasser. » Nous nous querellions là-dessus, vous savez que nous nous querellons quelquefois. Je l’aime bien, elle m’aime bien, mais elle a un si drôle de caractère ! Il faut que tout se passe à son idée, à sa mode. Aussi ne vivons nous pas ensemble…