Page:Cherbuliez - Amours fragiles, 1906.djvu/44

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rose dans son verre, et d’un ton d’humeur il cria : Entrez ! La porte s’ouvrit. M. de Miraval entra. La figure d’Horace se rembrunit ; cette apparition inattendue le consterna : il se sentit comme subitement expulsé de son paradis. Hélas ! la vie la plus heureuse n’est qu’un paradis intermittent.

Le marquis, immobile sur le seuil, salua gravement son neveu, en lui disant :

« Eh quoi ! je te dérange ? Tu n’as jamais su dissimuler tes impressions.

— Ah ! mon oncle, répondit-il, comment pouvez-vous croire ?… Je vous avoue que je ne m’attendais pas… Mais, je vous prie, par quel hasard ?…

— Je fais un voyage en Suisse. Pouvais-je passer à Lausanne sans venir te voir ?

— Convenez, mon oncle, que vous ne passez pas, reprit Horace ; convenez que vous êtes beaucoup plus qu’un passant, que vous arrivez ici tout exprès.

— Tout exprès, tu l’as dit, mon garçon, repartit M. de Miraval.

— C’est donc à un ambassadeur que j’ai l’honneur d’avoir affaire ?

— Oui, à un ambassadeur, très ferré sur l’étiquette et qui demande qu’on le reçoive avec tous