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LE COMTE KOSTIA

« Tu es à ma merci! lui dit à la fin le jeune homme. Je te fais grâce, si tu me demandes pardon à deux genoux.

— Je n'en ferai rien, répondit l'enfant en se relevant, je n'ai pas de pardon à vous demander. Vous m'aviez frappé de votre cravache, j'avais juré de me venger. Je suis très-adroit; j'ai visé à votre barrette, j'étais sûr de ne pas la manquer. Cela vous a rendu furieux, nous voilà quittes. Maintenant je vous pro- mets de ne plus vous jeter de pierres, à la condition que vous-même vous ne me donnerez plus de coups de cravache.

— Ce qu'il propose est fort raisonnable, dit Gilbert.

— Je ne vous demande pas votre avis, monsieur, » interrompit Stéphane avec hauteur, et se tournant vers Ivan : « Ivan, mon cher Ivan, reprit-il, en ce cas-ci tu dois m'obéir. Tu le sais bien, le bârine ne m'aime pas, mais il n'entend point que les autres me fassent insulte; c'est un droit qu'il se réserve. Descends de cheval et force ce petit drôle à s'agenouiller et à me demander pardon. »

Ivan secoua la tête.

« Vous l'avez frappé le premier, répondit-il; pourquoi vous demanderait-il pardon? »

Stéphane épuisa en vain les supplications et les menaces. Le serf demeura inflexible, et pendant ce pourparler Gilbert, s'approchant de Wilhelm, lui dit à voix base :

« Sauve-toi vite mon enfant; mais rappelle-toi bien ta promesse; sinon, c'est à moi que tu auras affaire. »

Stéphane le vit s'enfuir, il voulut s'élancer après lui; Gilbert lui barra le passage.