Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/105

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parlez de nous à la police ou à âme qui vive, il me faudra subir ces deux minutes et demie de désagrément. Quant à l’ennui qui en résulterait pour vous, je n’y insiste pas. Adieu, donc, et prenez garde à l’escalier.

Le ci-devant Gogol, le détective aux cheveux roux se leva sans mot dire et quitta la chambre, lentement, avec un air de parfaite nonchalance. Mais Syme, stupéfait, put se convaincre que cette aisance était jouée, car un léger trébuchement l’avertit bientôt que le détective n’avait pas pris garde à l’escalier.

— Le temps passe, dit le Président de sa façon la plus enjouée en consultant une montre qui, comme lui-même et comme tout ce qu’il portait sur lui, était de dimensions anormales. Il faut que je vous quitte sur-le-champ : j’ai l’obligation de présider une réunion humanitaire.

Le secrétaire se tourna vers lui, les sourcils froncés.

— Ne vaudrait-il pas mieux, dit-il sèchement, reprendre la discussion de notre projet, maintenant que nous sommes entre nous ?

— Je ne suis pas de votre avis, répondit le Président, avec un bâillement comparable à un discret tremblement de terre. Laissons tout en plan. Samedi arrangera tout. Je m’en vais. Je suis pressé. Nous déjeunerons ici dimanche prochain.

Mais la scène dramatique à laquelle il venait d’assister avait singulièrement surexcité le système