Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/111

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trouvant devant une maison de thé ouverte le dimanche, il s’y réfugia. Par contenance, il commanda une seconde tasse de café noir. À peine l’avait-il commandée que le professeur de Worms, péniblement et en trébuchant, ouvrait la porte de la boutique et, s’asseyant avec difficulté, demandait une tasse de lait.

La canne de Syme lui échappa des mains et fit en tombant un bruit métallique qui révéla la présence de l’épée. Le professeur ne parut pas avoir entendu. Syme qui était un homme plutôt calme le regardait, bouche bée, comme un paysan qui assiste à un tour de passe-passe. Il n’avait remarqué aucun cab derrière lui ; il n’en avait pas entendu s’arrêter devant la boutique. Selon toute apparence, le professeur était venu à pied. Mais quoi ? Le vieillard n’allait guère plus vite qu’un escargot, et Syme avait filé comme le vent !

Affolé par l’invraisemblance matérielle du fait, il se leva, ramassa sa canne et s’esquiva, sans avoir touché à son café. Un omnibus se dirigeant vers la Banque passait à grande allure. Syme dut faire une centaine de pas en courant pour l’atteindre. Il sauta sur le marchepied, respira un instant, puis monta à l’impériale. Il y était installé depuis une demi-minute, à peu près, quand il entendit venir d’en bas un souffle d’asthmatique. Se retournant aussitôt, il vit s’élever graduellement sur les marches de l’omnibus un chapeau haut de forme, blanc de neige, puis le visage de myope, puis les