Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/164

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parole ; mais le marquis recula d’un haut-le-corps en renversant sa chaise, et ses deux amis aux chapeaux hauts de forme saisirent Syme par les épaules.

— Cet homme m’a insulté ! cria Syme avec les gestes de quelqu’un qui veut s’expliquer.

— Insulté ? Vous ? dit le monsieur décoré. Quand ?

— À l’instant même ! Il a insulté ma mère !

— Insulté votre mère ! répéta le monsieur, incrédule.

Syme fit une concession.

— Non, dit-il, pas ma mère ; ma tante. D’ailleurs, peu importe.

— Mais comment le marquis aurait-il pu insulter votre tante ? fit le second monsieur avec un étonnement assez légitime. Il ne nous a pas quittés.

— Mais !… par ses paroles ! répondit Syme tragiquement.

— Je n’ai rien dit du tout, assura le marquis, sauf quelques paroles à propos de l’orchestre. Je crois avoir observé que la musique de Wagner ne supporte pas une exécution imparfaite.

— C’était une allusion directe à ma famille, dit Syme avec fermeté. Ma tante jouait très mal la musique de Wagner. C’est là un sujet de conversation qui fut toujours bien pénible pour les miens. On nous a souvent insultés à propos de cela.