Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/175

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que Satan lui-même ne peut pas faire : je puis mourir.

Il articulait mentalement ce mot, quand il entendit un sifflement faible et lointain : encore quelques secondes, et à ce sifflement succéderait le tonnerre du train de Paris.

Il se remit à tirer avec une légèreté, une adresse qui tenait du prodige, tel le mahométan qui soupire après le paradis.

Comme le train se rapprochait, Syme se représentait les gens, à Paris, occupés à parer les rues, à dresser des arcs de triomphe ; il prenait sa part de la gloire de la grande République dont il défendait la porte contre l’enfer. Et ses pensées s’élevaient toujours plus haut, à mesure que le bruit de la machine se faisait plus distinct, plus puissant. Ce bruit cessa dans un suprême sifflement, prolongé et strident comme un cri d’orgueil. Le train s’arrêtait.

Tout à coup, au grand étonnement de tous, le marquis recula hors de la portée de l’épée de son adversaire et jeta la sienne à terre. Son geste était admirable, d’autant plus peut-être que Syme venait de lui plonger son épée dans le mollet.

— Arrêtez ! dit le marquis avec une autorité irrésistible. J’ai quelque chose à dire.

— Quoi donc ? demanda le colonel Ducroix, stupéfait. Y a-t-il eu quelque irrégularité ?

— En effet, intervint le docteur Bull, qui était légèrement pâle. Notre client a, quatre fois au