Page:Chesterton - Le Nommé Jeudi, trad. Florence, 1911.djvu/24

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stérile. Et voici l’anarchie, riche, vivante, féconde, voilà l’anarchie dans sa splendeur verte et dorée.

— Et pourtant, répliqua Syme avec patience, en ce moment même vous ne pouvez voir l’arbre qu’à la lumière de la lampe. Pourriez-vous jamais voir le réverbère à la lumière de l’arbre ?

Puis, après un silence :

— Me permettez-vous de vous demander si vous êtes resté ici, dans l’obscurité, uniquement pour reprendre notre petite discussion ?

— Non ! cria Gregory, et sa voix remplit la rue. Je ne vous ai pas attendu pour reprendre notre discussion, mais pour y mettre fin à jamais.

Le silence retomba. Syme, sans y rien comprendre, s’apprêtait à écouter, s’attendant à quelque chose de sérieux. Gregory commença, sur un ton singulièrement radouci, avec un sourire inquiétant :

— Monsieur Syme, ce soir, vous avez réussi quelque chose d’assez remarquable. Vous avez fait ce que, jusqu’à cette heure, personne, ni homme ni femme, n’était encore parvenu à faire.

— Vraiment !

— Attendez, reprit Gregory pensif. Maintenant que j’y songe, il me semble que quelqu’un y est parvenu avant vous. C’était le capitaine d’un bateau-mouche, si mes souvenirs sont exacts, à Southend. Monsieur Syme, vous m’avez irrité.

— Je le regrette profondément, dit Syme avec gravité.

— Je crains, continua Gregory, très calme, que