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Page:Chesterton - Le Retour de Don Quichotte.djvu/159

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gens qui ont ce point d’appui historique s’en souviennent toujours, ne fût-ce que dans leur subconscient. Quoi qu’il en soit, on commença bientôt à dire qu’elle encourageait la folie du bibliothécaire.

Il est inutile de dire que la fille de Lord Seawood se trouvait entourée d’un nuage de gloire, sous la forme d’une foule de jeunes gens. Elle avait beaucoup de titres à cette sorte de popularité. Elle était une héritière, mais il faut reconnaître que les plus chevaleresques l’admiraient non pour sa richesse, mais pour sa beauté. Elle était belle, mais il faut lui rendre justice et reconnaître que les plus sérieux l’admiraient surtout parce qu’elle était bonne fille, et plus spécialement parce qu’elle était belle joueuse. Il en résultait que beaucoup la suivaient partout où elle allait, même si elle menait un branle très différent des danses à la mode. C’est ainsi que surgit, d’abord par jeu, puis bientôt sérieusement, un nouveau « médiévalisme » à la mode, une course où tous les jeunes gens suivaient la jeune fille, qui suivait le bibliothécaire. Et parce qu’il y avait là dedans une certaine candeur, cette candeur qui ne rougit pas de pleurer en demandant la lune, cela avait aussi la verdeur du printemps et de la jeunesse. C’était de la poésie aussi bien que de la mode. Les jeunes gens devinrent des manières de poètes, de petits poètes au moins. Avec l’aide de Herne comme érudit et de Rosamund comme régisseur de la scène, ils remplirent leurs vers d’emblèmes, de bannières et de processions, qui défiaient encore plus le goût moderne que leur costume de théâtre. Les jeunes gens furent spécialement séduits par l’idée de faire revivre le jeu de l’arc, lointaine réminiscence des flèches du dieu d’Amour. Ce fut peut-être une autre association d’idées, aussi puérile, qui les détermina à envoyer