veler leurs provisions, sont livrés à toutes les angoisses de la faim.
À propos d’un procès politique qu’il eut à soutenir, et où il avait été condamné par l’effet, suivant lui, des déclamations du ministère public, Paul-Louis Courier s’écriait dans son langage original : Dieu nous garde du Malin et de la métaphore ! entendant par là que l’emploi de l’éloquence et des moyens oratoires, dans les discussions juridiques, est propre à troubler le jugement. Avec des figures de rhétorique, en effet, un avocat général passionné peut, transfigurer des actions innocentes ou de simples peccadilles en des crimes exécrables. L’avis de Paul-Louis Courier est bon à suivre ailleurs que dans les questions juridiques. Il l’est particulièrement dans les matières scientifiques.
Malthus était un savant, il employait de préférence la langue de la science, qu’il parlait admirablement ; mais se souvenant qu’il était ministre du saint Évangile ; le cœur déchiré au spectacle des maux qui se présentaient à lui comme provenant de la disproportion entre la population et les moyens d’existence, il lui arriva quelquefois peut-être d’exhaler sa douleur par des paroles d’une éloquence amère. Il fit un peu de métaphore, et notamment cette phrase, qui est demeurée célèbre, des hommes qui sont de trop au banquet de la vie. C’est de ces quelques mots épars que se sont saisis les adversaires de Malthus et de l’économie politique, en tant que celle-ci approuvait les opinions de cet auteur célèbre. Par un procédé peu charitable, ils les ont séparés de tout ce qui les entourait et en faisait ressortir clairement le sens, et, y attachant leurs propres commentaires, ils en ont fait une sorte d’imprécation contre les consolations que le pauvre trouve à s’entourer d’une famille ; ils les ont représentés comme un vœu homicide, tandis que ce n’était que le cri d’un homme