Page:Chevalier - Les Pieds-Noirs, 1864.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 121 —

de bourse pour le tabac, faite avec la dépouille d’un lynx et frangée d’écarlate, couvrait sa poitrine.

À côté, on voyait le sac à médecine, en peau de cygne, renfermant les totems, amulettes ou talismans chargés de protéger le guerrier et de lui rendre favorable Manabozho, manitou des combats.

Ses mitas et ses mocassins étaient tout bariolés de dessins en piquants de porc-épic aux nuances brillantes. D’une main, il tenait son casse-tête (ma-ni-qua-pe-cac-sa-que), massue de trois pieds de long, recourbée et terminée par une forte boule de silex.

Son autre main agitait, en parlant, un long calumet (ta-cou-e-ni-man). Le fourneau, en talc vert piriforme, reposait sur un pied cubique ; le tuyau plat, façonné comme un serpent, avait pour ornement un éventail de plumes multicolores et un bec de pic rouge.

Il parlait au son cadencé d’une espèce de tambour de basque que faisait résonner le méda, et disait, en frappant violemment le sol de son pied :

I

« Écoutez ma voix, ossements de mes ancêtres, et vous héros qui m’entourez ! Aujourd’hui, quand nos intrépides guerriers ont fondu sur les visages pâles, nos lâches ennemis, mon cœur brûlait de tirer une juste vengeance de leur race cruelle et perfide, et la soif de mon cœur a été étanchée.

II

» Voyez ! ma poitrine a saigné ! Voyez, voyez les blessures que j’ai reçues au combat ! Elles sont profondes mais elles sont nobles, et les montagnes ont tremblé à mon cri de guerre, et j’ai lutté pour ma vie et j’ai remporté la victoire.

III

» Mais où iront nos ennemis ? Ils mourront ; ils fuiront à travers la plane comme des lièvres timides ; ils frémiront comme la feuille du bouleau au souffle de l’ouragan ; ils tomberont comme des épis de maïs sous les coups des valeureux Piekans[1].

  1. Ainsi, en indien, s’appellent les Pieds-noirs.