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Loup doive mourir avant l’âge, pensez-vous qu’il ne sera pas vengé ?

— Qui donc vengera un petit misérable comme toi ? demanda Mark d’un ton méprisant.

— Le jeune guerrier qui aime Lever-du-soleil frappera un coup pour Le Loup. Les vents et les oiseaux de l’air voleront lui dire ce que vous avez fait. Ceux de ma race l’apprendront aussi. Le rugissements des Pieds-noirs retentira sur votre piste. Ils couperont votre chair en morceaux qu’ils jetteront au feu ! chaque minute de mon agonie, vous l’expierez par des heures de torture.

— Emmène-le, Chris ; il m’agace les nerfs, s’écria Mark.

La canot quitta la rive. Le Loup commença à chanter son chant de mort, dont les strophes s’élevèrent tantôt en accords puissants, victorieux et tantôt descendirent en cadences basses et mélancoliques.

Il disait :

I

« Les perfides visages pâles avaient fait tomber dans leurs trappes un faible rejeton des braves Pieds-noirs ; et ce petit enfant, ils avaient voulu l’élever dans la lâcheté et la servitude ; mais en grandissant, il a senti son sang bouillir dans son cœur, et il a voulu se venger.

II

» Il s’appelait Le loup ; il aimait une fille des visages pâles. Elle était belle comme les fleurs parfumées du printemps. Sa taille était plus souple que celle de la panthère ; sa voix coulait douce comme l’onde des ruisseaux. Le Loup voulait l’emporter avec lui aux loges des vaillants Pieds-noirs.

III

» II la nommait Lever-du-soleil, car elle avait l’éclat du soleil levant ; mais le Grand Esprit n’aime pas les filles pâles : il n’a point voulu d’elle pour femme d’un noble Pied-noir, et il appelle Le Loup vers les grands territoires de chasse où sont allés ses pères.