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Page:Chevalier - Peaux-Rouges et Peaux-Blanches, c1864.djvu/249

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assiégés, j’enjambai le canot pour me précipiter dans la rivière.

— Mon frère est leste comme un couguar, mais la main du Serpent-Jaune est plus leste encore, dit un de mes gardiens en m’arrêtant par le cou.

Je n’essayai pas de lutter : il m’étranglait.

Alors son compagnon et lui me lièrent les mains et les pieds et me couchèrent au fond de l’embarcation. Je n’en fus pas fâché. Dans cette position je ne pouvais plus considérer le drame horrible qui se jouait, tout à l’heure, sous mes yeux.

Cependant, le Mangeux-d’Hommes et ses Apôtres, qui n’avaient pas bougé jusque-là, se mirent en devoir de passer la rivière. Je compris la tactique du capitaine. Ne comptant qu’à demi sur la bonne foi de ses auxiliaires, il avait voulu leur laisser engager l’action avant d’exposer sa propre bande. S’ils l’avaient trompé ou s’ils avaient été repoussés, il pouvait encore se sauver. Mais la victoire se rangeant de son côté, il allait en recueillir les fruits.

Quoique les vociférations augmentassent, les détonations des armes à feu diminuaient sensiblement.

Lorsque le jour se leva, elles avaient tout à fait cessé. On me conduisit à l’autre bord, où je fus délié, mis en liberté.

Des ruisseaux de sang coulaient sur le rivage, jonché de morts et de mourants.